Programmation de recherche


Objectifs

L’objectif général de l’équipe RAPS est double. D’une part, il s’agit de comprendre la nature des liens entre climat social, attitudes de légitimation de la violence et passages à l’acte, et de documenter l’évolution de ces dynamiques dans un contexte de transformation sociale rapide. D’autre part, l’équipe vise à développer, implanter et évaluer l’efficience des programmes de prévention primaire et d’intervention pour les personnes radicalisées et leur entourage, afin d’atténuer les effets du contexte actuel et ses impacts en termes de tensions sociales et de violences agies (crimes et incidents haineux, tueries de masse).

Les objectifs spécifiques structurent la programmation de recherche (objectifs 1 à 5) et d’intégration intersectorielle des connaissances et des pratiques (objectifs 6 à 9). Ces objectifs consistent à :

  1. Documenter les déterminants de la polarisation des attitudes menant à la légitimation de la violence contre l’Autre, et étudier l’évolution de ces attitudes en lien avec les transformations du contexte local, national et international ;

  2. Documenter les trajectoires de personnes attirées et/ou impliquées dans des mouvances extrémistes ;

  3. Développer et évaluer des programmes de prévention primaire visant une réduction des tensions inter-groupales et intercommunautaires et une amélioration de la cohésion sociale à partir de la valorisation des appartenances multiples ;

  4. Évaluer l’implantation et l’efficience du réseau provincial de services cliniques mis en place à l’initiative du MSSS pour intervenir spécifiquement dans des situations associées à la radicalisation violente (RV) (gestes haineux et problèmes de sécurité nationale) ;

  5. Compléter et évaluer les différentes composantes de l’offre de formation sur les processus de radicalisation violente, et outiller adéquatement les praticiens des réseaux de la santé et de l’éducation et les membres des forces de sécurité aux niveaux provincial et national ;

  6. Faciliter les échanges théoriques et méthodologiques et le partage de pratiques entre disciplines et secteurs sociaux afin de promouvoir une intégration des perspectives au travers d’actions intersectorielles ;

  7. Générer un dialogue ancré dans une réflexion éthique entre les acteurs du champ de la sécurité et ceux associés au champ social et communautaire, dans le respect de leurs mandats respectifs ;

  8. Mutualiser les travaux de mobilisation des connaissances (outils partagés, programmes conjoints de formation) ;

  9. Augmenter le rayonnement de la contribution québécoise au niveau national et international.


Axes de recherche

La programmation de recherche de l’équipe RAPS est structurée autour des priorités des partenaires. Elle se décline en trois axes :

Axe I : Recherche (les déterminants populationnels de la radicalisation violente) - Direction Morin et Mekki-Berrada

Cet axe regroupe des enquêtes longitudinales sur les déterminants micro, méso et macrosociaux du soutien à la radicalisation violente, des recherches sur l’évolution des crimes et incidents haineux au Québec et les discours qui y sont associés (en particulier d’extrême droite, masculinistes et complotistes), ainsi que sur la place du religieux. 

Cet axe répond aux objectifs 1, 2, 8 et 9.

Une revue continue de la littérature et un rapport sur les crimes et incidents haineux au Québec soutiennent ces travaux, qui se rassemblent en :

  1. Un premier groupe de projets, qui poursuit l’étude des déterminants (facteurs de risque et de protection) des attitudes favorables à la radicalisation violente au Québec, en proposant un monitoring de ces attitudes tous les deux ans dans les milieux universitaire et collégial, un suivi longitudinal en population générale au Canada (jeunes), et une extension à l’Italie et à la Suède des comparaisons transnationales en cours (Belgique, États-Unis);

  2. Un deuxième groupe de projets, qui s’attache à saisir les dynamiques sociales mobilisées autour de la question du religieux et du spirituel, non seulement à travers leurs dérives extrémistes, mais aussi dans leurs dimensions discursives, postcoloniales et subjectivantes. L’islamophobie est ici conceptualisée comme l’une des formes de radicalisation de la majorité, pouvant mener à la violence;

  3. Un troisième groupe de projets, qui documente les dynamiques groupales associées aux mouvances d’extrême droite et au courant masculiniste (notamment autour de l’infodémie, la désinformation, les théories du complot, les Incels);

  4. Un quatrième groupe de projets, qui explore le monde des médias et des médias sociaux, et leur double rôle de révélateurs des discours qui structurent les attitudes et d’accélérateurs de la propagation de ces discours.

Axe II : Prévention primaire et formation (développement et évaluation des programmes) - Direction El Hage et Audet

À partir des données québécoises sur les déterminants, et de la revue systématique de la littérature sur la prévention primaire,cet axe vise à développer et évaluer des pratiques préventives novatrices. 

Cet axe répond aux objectifs 3, 6, 8 et 9. Les projets se regroupent ainsi :

  1. Projets visant l’évaluation des programmes en prévention primaire de la radicalisation violente, pour recueillir et développer des connaissances sur les outils, stratégies et modèles d’évaluation de pratiques (évaluation de la pièce «Qui a tué Freebird?» du Théâtre social Parminou, évaluation de PhiloJeunes);

  1. Projets visant la formation des enseignants des établissements scolaires (intervenir en contexte de diversité ethnoculturelle, récits de pratique à propos de la compétence interculturelle et inclusive, traitement des thèmes sensibles à l’école secondaire pour soutenir les enseignants d’histoire et d’éthique et culture religieuse, webdocumentaire pour combattre le racisme, les discriminations et la radicalisation);

  2. Partenariat avec le MEQ sur les réponses au climat de polarisations sociales, dans le cadre de son plan de lutte à l’intimidation (2021-2026).

Axe III : Intervention (développement et évaluation de programmes) - Direction Hassan et Benoit

Les recherches de cet axe concernent l’étude des trajectoires de sujets à risque, la cartographie des ressources existantes au Canada, la revue systématique des différents outils et méthodes d’évaluation du risque dans le domaine (Impact, 2017), et l’évaluation du réseau de services mis en place au Québec par le MSSS dans le cadre du plan d’action gouvernemental 2015-2018


Mobilisation des connaissances

Au sein de l’équipe RAPS rassemblant partenaires, chercheurs, praticiens et étudiants, les connaissances sont partagées de façon continue par le bulletin interne, les pages Internet et les réseaux sociaux, et lors des rencontres mensuelles. Les collaborations de recherche entre chercheurs et partenaires des milieux sont aussi encouragées et soutenues par l’octroi de bourses annuelles pour des projets-pilotes innovants.

Plusieurs formes de mobilisation des connaissances existent à divers niveaux :

  • La mobilisation des connaissances dans les réseaux des partenaires est prioritaire et se fait via des formations générales ou spécialisées sur la prévention et l’intervention en situation de radicalisation violente (réseau scolaire, santé et services sociaux, forces de l’ordre, milieu communautaire). Les contenus sont régulièrement mis à jour pour le Québec et le Canada, en partenariat notamment avec le CPN-PREV. Divers outils, guides et autres ressources sont également développés et diffusés dans les milieux de pratique pour répondre aux besoins. 

  • Pour le réseau clinique, la mobilisation des connaissances prend la forme d’une communauté de pratique des cliniciens de cinq villes par webinaires mensuels autour de discussions de cas, un modèle favorisant un apprentissage théorique ancré dans la pratique. 

  • La tenue de journées thématiques et de colloques, et la participation des chercheurs ou partenaires à des événements à l’échelle locale, nationale ou internationale, permet la mobilisation en direction d’un public élargi de praticiens, décideurs et chercheurs, et valorise la pluralité des positions et des perspectives.

  • L’ensemble des acteurs sociaux et le grand public sont rejoints par les réseaux sociaux et les médias traditionnels via une présence médiatique régulière et via des initiatives de prévention primaire (théâtre, projet Someone). 

  • Les décideurs nationaux et internationaux sont informés par le biais d’avis de la recherche et la production de lignes directrices, et par des consultations directes avec les ministères (question des revenants au fédéral, approches face aux complotistes).